Communiqué de Presse – Mineurs Isolés

Le 20 février 2018

Pour une protection de l’enfance, immédiate, pleine et entière

La mission bipartite (composée de ministères et de départements), nommée par le Premier ministre, a rendu son rapport sur la réforme du dispositif d’évaluation et d’accueil provisoire d’urgence des mineur⋅e⋅s isolé⋅e⋅s étranger⋅e⋅s.

Loin des considérations de protection de l‘enfance, ce rapport confirme la vision purement budgétaire et technocratique qui semble animer les pouvoirs publics, n’utilisant même jamais le terme « enfant » lui préférant celui de « flux ».

Tout en décrivant deux scénarios possibles, ce rapport semble privilégier le transfert de compétences des missions d’évaluation et d’hébergement d’urgence des départements vers l’État, ce qui aboutirait à un régime discriminatoire à l’égard des jeunes exilé.e.s.

Nous nous opposons à ce transfert de compétences, les mineur⋅e⋅s isolé⋅e⋅s devant relever de la protection de l’enfance et être considéré⋅e⋅s avant tout comme des enfants et non comme des étranger⋅e⋅s.

Les dysfonctionnements actuels proviennent essentiellement d’un manque de moyens financiers et humains criant, avec pour conséquence des évaluations empreintes de suspicion, des mises à la rue brutales et/ou des conditions de prise en charge indignes.

Par ailleurs, sont prévues un certain nombre de préconisations communes aux deux scénarios particulièrement inquiétantes qui nous alertent sur les objectifs réels de cette réforme.

Ainsi, la notion « d’accueil provisoire d’urgence » semble disparaître au bénéfice d’une simple « mise à l’abri ».

La création d’un circuit court pour les jeunes manifestement mineur⋅e⋅s ou majeur⋅e⋅s interroge : qui va décider de « l’âge manifeste », sur quels critères objectifs et fiables et quel recours sera effectivement prévu ? Il est inacceptable de priver ainsi de nombreux jeunes d’un droit à une protection sans que leur situation n’ait même été examinée.

La question du maintien de la mise à l’abri des jeunes, en cas de recours contre la décision de non-lieu à assistance éducative, si elle est énoncée dans le rapport, n’est pas tranchée, alors que le maintien du jeune dans un lieu d’hébergement jusqu’à l’épuisement des voies de recours est l’unique moyen de voir respecté le droit au recours effectif qui doit être protégé conformément aux articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l’Homme. La note ne traite d’ailleurs pas des conditions concrètes pour exercer ce recours, notamment quant à l’information donnée au jeune et l’accès à un avocat.

Enfin, sous prétexte de prévenir les réévaluations dont le chiffre n’est pas établi – de l’aveu de la mission elle-même –, un fichier national biométrique est proposé pour créer un système de reconnaissance des jeunes évalués majeurs, ce qui est inacceptable en termes de libertés individuelles. Les deniers publics employés à ce fichier, chiffré à hauteur de 5 millions d’euros, seraient mieux employés pour aider les départements à protéger dignement les jeunes.

Le socle commun proposé par la note, vient en réalité créer de véritables centres de tri, lieux d’hébergement spécifiques, où les jeunes seraient fichés, triés et évalués, sans garanties de pouvoir exercer leurs droits.

Au-delà de ce socle commun, le scénario imaginé par la mission concernant le transfert de compétences à l’État de la mise à l’abri et de l’évaluation, est totalement irréaliste et particulièrement dangereux.

Ainsi, les missions de mise en œuvre de l’évaluation de la minorité et de l’isolement pourraient être confiées au Préfet. La note prévoit que des agents des préfectures, en lien avec la police aux frontières, seraient chargés d’évaluer la véracité de la minorité et donneraient soit un avis conforme sur la minorité, soit une décision de refus de saisine du parquet, décision insusceptible de recours.

Ce scénario qui revient à laisser l’entier pouvoir aux préfectures de statuer sur la minorité, confirme nos inquiétudes quant au régime discriminatoire qui pourrait désormais s’appliquer pour ces mineur⋅e⋅s isolé⋅e⋅s étranger⋅e⋅s, les abandonnant à des centres de tri et laissés à disposition des préfectures pour mieux les éloigner, après des procédures d’évaluation alibi et des accompagnements socio-éducatifs inexistants.

Une telle réforme serait non seulement contraire aux principes et aux droits tels que définis par les conventions internationales, mais renverserait également tous les principes de protection de l’enfance du droit français.

Le gouvernement doit faire le choix du respect des droits des enfants en allouant des moyens supplémentaires aux services de la protection de l’enfance.

 Signataires :

  • ADMIE (Association pour la Défense des Mineurs Isolés Étrangers)
  • AMIE Lyon (Accueil des Mineurs Isolés Étrangers)
  • La CIMADE
  • DEI-France (Défense des Enfants International)
  • ENSEIGNANTS POUR LA PAIX
  • FASTI (Fédération des Associations de Solidarité avec Tou⋅te⋅s les Immigré⋅e⋅s)
  • FEDERATION SUD Éducation
  • FCPE Nationale (Fédération des Conseils de Parents d’Élèves)
  • FERC-CGT (Fédération de l’Éducation, de la Recherche et de la Culture)
  • FSU (Fédération Syndicale Unitaire)
  • GISTI (Groupement d’information et de soutien des immigré⋅e⋅s)
  • LDH (Ligue des Droits de l’Homme)
  • MEDECINS DU MONDE
  • MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples)
  • MELTING PASSES
  • MIN’DE RIEN 86
  • PARIS D’EXIL
  • RESF (Réseau Éducation Sans Frontières)
  • SAF (Syndicat des Avocats de France)
  • SNPES-PJJ/FSU (Syndicat National des Personnels de l’Éducation et du Social -PJJ/FSU)
  • SYNDICAT DE LA MAGISTRATURE

 

Contacts :

ju.jies@outlook.fr

Brigitte Jeannot tél. 03 83 35 42 55

Jean-François Martini tél. 01 43 14 84 86

Lien pour le texte du 

Communiqué de presse Jujie février 2018

Didier FASSIN – Sociologue – Notre dispositif d’accueil des migrants est très déficient

Contrairement à sa réputation, à son image de pays des droits de l’homme, la France pratique l’une des politiques les moins accueillantes au sein de l’Europe de l’Ouest si l’on en juge par les taux d’accord en matière d’asile au cours des dernières décennies. Il existe cependant dans la Société française nombre de personnes qui aident, participent bénévolement aux soins, à l’accueil, au conseil juridique des réfugiés. C’est un point important. On ne peut pas de faire une idée de la politique de la France si on la réduit à la politique de l’Etat. Il y a une politique de la Société qui fait heureusement plus honneur à notre tradition supposée. 

Nous avons l’impression d’être pris dans un phénomène inédit alors que l’histoire du XXé siècle a été marquée par des vagues de réfugiés – depuis celle des Russes blancs après la révolution d’octobre de 1917 jusqu’aux boat-people

Quand on a commencé à parler des immigrés en situation irrégulière dans les années1990, le politique et le médiatique se sont rejoints autour d’une même représentation du clandestin, découvert dans une cale de bateaux ou à l’arrière de camions.  Or la majorité des personnes concernées avaient eu un titre de séjour légal, mais l’avaient perdu souvent suite à des modifications de législation ou  des pratiques dans les Préfectures. En fait c’était l’Etat lui-même qui produisait de l’irrégularité.

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Tous hors la loi – Eric FOTTORINO

C’est une tache sur ce début de XXIè siècle.

Cette tache ce ne sont pas les hommes , les femmes, les enfants -en bas âge, parfois – que nous envoient les guerres, les violences et les dictatures en tous genres. Cette tache, c’est notre incapacité à traiter humainement des êtres humains qui ont surmonté l’insurmontable, la maltraitance des bourreaux ordinaires, des trafiquants de misère, le cynisme intéressé des passeurs qu’on appellerait bien “trépasseurs” si le mot existait.

Une fois là on ne peut pas faire  comme sils ne l’étaient pas …. comme s’ils n’existaient pas

Face à cettte impasse tout le monde se met hors la loi ou quasiment. L’Etat pour appliquer a minima la convention de Genève. La police pour contrôler et réprimer. Les simples citoyens bénévoles et les associations pour venir au secours des réfugiés livrés à eux-mêmes, la compassion en guise de sauf-conduit.

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FOTTORINOA_Tous hors la loi